L’acédie : un trouble de l’âme très répandu

Parmi les maladies de l’âme identifiées par les Pères du désert, ces ermites thérapeutes des premiers siècles du christianisme, il y en a un peu connu et pourtant tellement fréquent encore aujourd’hui : l’acédie. Ce terme plus souvent associé à la vie monastique peut en fait toucher chacun d’entre nous, dans sa vie spirituelle mais aussi dans tous les autres domaines de sa vie (professionnel, relationnel, familial …), . Si vous ressentez régulièrement morosité, ennui, manque d’enthousiasme face à votre vie, peut-être souffrez-vous également d’acédie. Découvrez quelle forme ce mal peut prendre et surtout comment le combattre efficacement !

Qu’est-ce que l’acédie ?

Un mal vieux comme le monde …

L’acédie est un mal de l’âme universel et intemporel. Il s’agit d’une tendance très humaine, comme le montre l’enseignement des Pères du désert qui en faisaient eux-mêmes l’expérience dans les déserts égyptiens au III et IV ème siècle de notre ère. Proche de la mélancolie, l’acédie nous fait éprouver de l’ennui, voire du dégoût envers les lieux, activités, devoirs de notre vie. Tout perd de son sens, de sa saveur et nous tombons alors dans une forme d’apathieA quoi bon se donner du mal ? Le goût de l’effort est annihilé. 

Ce mouvement intérieur peut être amplifié par le manque de soin apporté à soi, et plus particulièrement le manque de soin à sa vie spirituelle. D’ailleurs étymologiquement, le terme acédie provient du grec ἀϰήδια qui peut être traduit par négligence.

L’Eglise Catholique définit l’acédie comme “ un mal de l’âme qui s’exprime par l’ennui, le dégoût pour la prière, la pénitence, la lecture spirituelle. L’acédie peut être une épreuve habituellement passagère, mais peut être aussi un état de l’âme qui devient une véritable torpeur spirituelle et la replie sur elle-même. C’est alors une maladie spirituelle.” (site de la conférence des évêques de France)

… et toujours actuel

La perte de sens est aujourd’hui de plus en plus fréquente dans nos sociétés. Les crises diverses, la perte de repères religieux, peuvent nourrir un sentiment d’incohérence, d’impuissance. 
Nous sommes aussi de plus en plus habitués à attendre et donc rechercher une gratification et une reconnaissance rapide de nos efforts
- A quoi bon se donner du mal si personne ne le voit ? 
- A quoi bon faire des efforts si je suis le seul à les faire ? 
- A quoi bon me mettre sur ce projet si je n’ai pas la certitude de pouvoir le terminer ?

Si nous ne donnons plus de sens à nos efforts, nous nous décourageons plus rapidement et perdons l’envie de persévérer malgré les difficultés ou les incertitudes.

Quelles sont les formes et les conséquences de l’acédie ?

Les symptômes de l’acédie

Si elle est une maladie de l’âme ou noopsychique, l’acédie touche également le corps et l’esprit. 
Elle peut prendre différentes formes selon les personnes et les circonstances. 

  • Morosité, apathie, difficulté à se motiver pour engager une nouvelle activité. Crainte de l’effort, paresse.
  • Hyperactivité, dispersion, difficulté à aller au bout d’un projet, zapping, manque de persévérance, abandon 
  • Perfectionnisme, difficulté à “terminer”

Quelle que soit la forme que peut prendre l’acédie, elle nous empêche de mener à bien un projet dans son ensemble en nous bloquant à l’une ou l’autre des étapes : amorcer, persévérer, terminer.

L’acédie à la source d’autres maux de l’âme

Pour les Pères du désert, l’acédie est une des principales maladies de l’âme car elle est la source d’autres déséquilibres et troubles intérieurs, comme la tristesse ou l’agressivité.

L’acédie peut aussi amener à développer des troubles anxieux et dépressifs voire burn out, bore out, brown out …

Le danger de l’acédie est également de mettre à mal notre vie intérieure et notre relation à Dieu. En effet, celle-ci demande effort et persévérance et se construit dans le temps. Le découragement causé par l’acédie nous empêche de continuer à avancer sur un chemin qui parfois peut être aride.

L’acédie selon la Bible 

La Bible souligne à différentes reprises les dangers de l'oisiveté et de la paresse, qu’elles concernent le travail physique, comme l’effort spirituel, qui sont d’ailleurs intimement liés dans la vision chrétienne (comme on le retrouve dans la règle de saint Benoit, “ora et labora”).
Voici 4 passages bibliques qui mettent en garde contre l’acédie
“La paresse fait tomber dans l’apathie : l’homme indolent aura faim.” (Proverbes 19, 15)
- “Ne devenez pas paresseux, imitez plutôt ceux qui, par la foi et la persévérance, obtiennent l’héritage promis.” (Hébreux 6, 12)
“Son maître lui répliqua : “Serviteur mauvais et paresseux, tu savais que je moissonne là où je n’ai pas semé, que je ramasse le grain là où je ne l’ai pas répandu. Alors, il fallait placer mon argent à la banque ; et, à mon retour, je l’aurais retrouvé avec les intérêts.” (Matthieu 25, 26-2) (Retrouvez l’intégralité de la parabole des talents)
“Nous vous demandons, frères, de reconnaître ceux qui se donnent de la peine parmi vous, ceux qui, dans le Seigneur, vous dirigent et vous donnent des avertissements ; estimez-les infiniment avec amour en raison de leur travail. Vivez en paix entre vous.

Nous vous en prions, frères : avertissez ceux qui vivent de façon désordonnée, donnez du courage à ceux qui en ont peu, soutenez les faibles, soyez patients envers tous.” (1 Thessaloniciens 5, 14)

Comment lutter contre l’acédie ?

Heureusement, face à ce mal qui traverse les temps, des remèdes - maintes fois éprouvés - existent !

Cultiver la gratitude 

La gratitude est le fait de se montrer reconnaissant pour tout ce que la vie nous apporte. Elle permet de voir le positif dans chaque situation. Cultiver cette tournure d’esprit est possible et nous permet de changer notre regard. Finis les “A quoi bon ?”, toute situation devient opportunité, défis, challenges
Au-delà de nous redonner allant et enthousiasme, c’est aussi notre vie spirituelle qui se développe car la gratitude permet de mieux accueillir et ressentir les grâces de Dieu dans notre vie. 
A faire :
Un premier pas facile et à la portée de tous pour commencer à transformer son regard est de commencer chaque journée par cette courte prière de gratitude proposée par Lionel Dalle dans son livre Le miracle de la gratitude.
Pour aller plus loin

Sur Meditatio, retrouvez 4 parcours sur la gratitude développés à partir du livre de Lionel Dalle, Le miracle de la gratitude.

Travailler avec persévérance

Pour les Pères du désert, le travail a trois principales finalités : répondre à nos besoins matériels, aider ceux dans le besoin et combattre l’acédie.
En effet, se remettre chaque jour à la tâche - quelle qu’elle soit - nous aide à développer la patience, la persévérance et le goût de l’effort. L’oisiveté et les distractions fréquentes alimentent l’acédie. C’est pourquoi les Pères recommandent stabilité et persévérance quand nous sentons que notre esprit est facilement distrait et ennuyé. 
“Un frère interrogea abba Achille : “Que ferai-je, père ? car je ne fais aucune oeuvre de moine, mais installé dans la négligence, je mange, je bois, je dors, je passe d'œuvres en oeuvres et de pensée en pensée et c’est pourquoi je suis attristé et découragé.” L’ancien lui dit : “Toi, reste dans ta cellule et fais ce que tu peux sans te troubler.”” (Retrouvez d’autres sentences des Pères du désert sur l’acédie)
A faire :
Choisir une tâche, même simple, et se fixer de la mener bien jusqu’à son terme est un exercice simple, à refaire chaque jour pour combattre efficacement contre l’acédie.
Pour aller plus loin
Sur Meditatio, découvrez la spiritualité moderne et incarnée des Pères du désert à travers différents parcours de méditations.

Développer sa vie intérieure

Les distractions de toutes sortes nourrissent l’acédie. Revenir à soi, être plus conscient des mouvements de l’âme nous permet de mieux comprendre ce qui se passe en nous et de lutter plus efficacement. La méditation est une aide à cela.
De plus, développer sa vie intérieure passe aussi par la prière qui nourrit notre relation à Dieu et nous aide à retrouver sens à la vie.
A faire 
 L’exercice de la garde du cœur, pratiquée par les Pères du désert, est simple et efficace. En nous permettant de ne pas laisser certaines pensées s’ancrer en nous, il nous donne davantage de force et de liberté.
Pour aller plus loin 

Meditatio est la première application de méditation chrétienne francophone. Téléchargez la gratuitement et découvrez des méditations chrétiennes guidées pour enrichir votre vie intérieure.

5 points clefs à retenir de cet article 

  1. L’acédie, forme de paresse spirituelle, est un mal de l’âme déjà pointé dans la Bible, mis en lumière par les Pères du désert et toujours d’actualité aujourd’hui.
  2. La négligence et le manque de soin porté à notre santé spirituelle nourrissent l’acédie.
  3. L’acédie peut prendre la forme d’une apathie ou au contraire d’une hyperactivité mais qui dans un cas comme dans l’autre empêche d’aller au bout des choses et soulignent une perte de sens.
  4. L’acédie peut être combattue par des attitudes telles que la gratitude, la persévérance, la stabilité.
  5. La méditation et la prière développent notre vie intérieure et aident à lutter contre l’acédie.
  1. (Re)vivez de l’intérieur – Jean-Guilhem Xerri – éditions Lexio
  2. Une pharmacie spirituelle pour toutes les situations - Anselm Grün - éditions Salvator
  3. Livre des anciens, Apophtegmes des Pères ; traduction de dom Lucien Regnault, édition Foi Vivante

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